Les sciences cognitives peuvent-elles prédire votre prochain choix ?

Home Blends & Trends 27 mars 2020

Choisir, c’est prendre une décision lorsque plusieurs options sont possibles. Il s’agit d’une expérience que nous vivons quotidiennement, entre autres quand on achète un produit ou un service : devrais-je acheter un nouveau smartphone plus grand, ou conserver mon appareil actuel et acheter une tablette ? Ou encore, dois-je prendre le train, l’avion ou la voiture pour mes prochaines vacances ? Autant de questions qui se trouvent au coeur de nos comportements et processus d’achats. 

Mais qu’est-ce que le choix ?

En l’occurrence, comprendre et guider le processus de choix se trouve au centre de l’activité des entreprises. Pour ce faire, elles sont de plus en plus nombreuses à appuyer leur analyse sur l’intelligence artificielle. Employant des algorithmes qui se nourrissent de données externes (météo, cours de l’euro…) et de données propres au client (ses derniers achats, sa fréquence de visite sur un site web…), l’IA permet de créer une analyse fine des parcours client afin de proposer des campagnes marketing personnalisées. 

Et si cette approche ne suffisait plus ? Si l’étude des parcours, online ou offline, n’était plus la seule donnée à prendre en compte ? 

En effet, l’un des piliers de la prise de décision manque à l’appel : la motivation client.

Tous les consommateurs issus d’un même segment marketing n’ont pas nécessairement les mêmes préférences, et encore moins les mêmes motivations d’achat : un client qui a l’habitude d’acheter toujours le même produit pourrait changer d’avis du jour au lendemain. Un autre, qui achète toujours son produit pour une certaine occasion à l’avance, pourrait finalement l’acheter à la dernière minute.

Vus de cette manière, les comportements sont imprévisibles ! Mais il est possible de mieux comprendre le mécanisme du choix. Il est donc essentiel aujourd’hui de passer de la question : « Qui sont mes clients et quels choix ont-ils fait auparavant ? » à la question : « Pourquoi ont-ils fait ces choix ? ». Cependant, l’IA à elle seule n’offre pas actuellement cette possibilité, d’où l’intérêt des neurosciences cognitives.

Ces sciences constituent un domaine interdisciplinaire permettant d’étudier les mécanismes du choix. Dans cet article, nous vous invitons à voyager au sein de trois disciplines qui cherchent à creuser les piliers de ce mécanisme : la psychologie, les neurosciences et l’IA. Bienvenue à bord de l’aventure des neurosciences cognitives… 

La psychologie du choix : du conditionnement au réflexe

D’un point de vue psychologique, notre vie passée joue un rôle crucial dans nos choix présents et futurs. Outre les comportements innés acquis dès la naissance, nos actions sont le fruit de nos choix. L’individu est constamment confronté à des stimuli positifs ou négatifs de son environnement avec lequel il interagit. Il apprend, développe et sculpte ces interactions au fur et à mesure pour formuler ce qui lui semblent être les meilleurs choix. En l’occurrence, on parle de conditionnement instrumental.

Dans ce type de conditionnement façonné par nos expériences, nos choix sont ajustés pour optimiser un gain particulier. Avouons-le, tout Parisien, à force d’avoir fait le même trajet en métro, a appris à prendre le wagon le plus proche de sa sortie !

Cependant, à force de passer par la même expérience, notre décision devient automatique. Dans ce cas, on parle alors de réflexe. 

Caricature de Mark Stivers sur le réflexe de Pavlov. Ce dernier, médecin et lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine de 1904, étudiait à la base la fonction gastrique chez l’animal quand il s’aperçut de ce qu’on appelle aujourd’hui “le réflexe pavlovien”!

Pavlov déclenchait une cloche à chaque fois qu’il donnait de la nourriture à son chien. Au fur et à mesure de son test, il a remarqué que son chien salivait en entendant la cloche sonner même quand il ne lui donnait pas à manger ! Les humains développent aussi cette forme de conditionnement à un stimulus censé être “neutre” : on parle de conditionnement classique.

Les neurosciences : le choix comme circuit de la récompense

Un neurobiologiste, quant à lui, s’intéresse plutôt aux mécanismes neurologiques qui expliquent le processus de décision. En d’autres termes, il s’intéresse à ce qu’on appelle « le circuit de la récompense », c’est à dire aux parties du cerveau qui sont en activité lorsqu’un choix s’opère, et la manière dont ces parties sont activées.

En l’occurrence, le neurobiologiste décrit la prise de décision comme l’interaction d’une molécule chimique appelée la dopamine et d’une partie avant du cerveau, dite le cortex préfrontal. A titre d’exemple, les recherches en conditionnement classique affirment qu’une récompense positive inattendue suite à une action augmente la décharge dopaminergique, alors qu’une absence de récompense diminue la décharge de dopamine dans le cerveau.  Et dire que nos choix irrationnels seraient peut-être simplement dus au dérèglement d’une molécule microscopique dans notre cerveau !

L’Intelligence Artificielle : la cerise sur le gâteau !

Le troisième pilier des neurosciences cognitives, l’ Intelligence artificielle, est également au coeur de l’étude de la prise de décision. A l’instar de l’être humain qui apprend de ses expériences passées pour optimiser ses choix dans le futur, les scientifiques ont développé des algorithmes dits d’apprentissage par renforcement (RL).

Ces algorithmes se basent sur des modèles mathématiques qui simulent la prise de décision chez l’homme : dans sa forme la plus basique, un agent explore différentes options, en choisit une, reçoit un retour de son choix, met à jour sa connaissance de l’option qu’il a choisi, et répète ces itérations un certain nombre de fois jusqu’à atteindre une stratégie optimale.

Les sciences cognitives au service du marketing chez fifty-five : jouez pour en savoir plus sur votre personnalité 

Chez fifty-five, en collaboration avec le Laboratoire des Neurosciences Cognitives Computationnelles à l’ENS, nous nous intéressons à la compréhension des mécanismes de prise de décision dans un contexte d’achat. Intitulé : “Analyse marketing depuis des expériences cognitives et modélisation du comportement”, ce projet scientifique a pour but d’explorer toute une catégorie de facteurs influençant la prise de décision chez le client et qui pourtant, sont peu explorés aujourd’hui.

Ainsi, l’objectif est double : aider les entreprises à mieux connaître les clients pour mieux les servir, et permettre à ces derniers d’obtenir une expérience optimale dans leurs interactions avec les marques.

Concrètement, nous travaillons sur deux axes en parallèle 

  • La conception de tests sous la forme d’un dilemme de choix, permettant d’étudier pour chaque cas un trait de caractère différent chez l’individu. Le sujet a plusieurs options devant lui, en choisit une, reçoit une récompense (positive ou négative) et répète ceci jusqu’à développer une stratégie. Ces tâches permettent de suivre comment un sujet interagit avec un environnement à choix multiples. 
  • Le développement des modèles d’apprentissage par renforcement pour comprendre et simuler le comportement d’une personne dans des contextes de choix variés. Les paramètres du modèle sont ajustés de façon individuelle de sorte à expliquer des comportements assez différents selon le profil des individus : a-t-on tendance à choisir les mêmes options ou à découvrir de nouvelles possibilités entre celles présentées ? Choisit-on les options avec un gain immédiat ou avec un retour positif sur le long terme ? etc.

Parmi ces questionnements, nous nous intéressons en premier lieu aux compromis gain long terme/court terme : prenons-nous des décisions qui nous donnent une meilleure récompense immédiate ou un gain long-terme plus important ? 

Si vous souhaitez découvrir ce que les données peuvent révéler de vous et de votre personnalité sur le compromis long terme et court terme, et nous aider à avancer dans nos recherches sur le sujet, cliquez ici ! Comptez environ 15 minutes pour le compléter.

Vous reprendrez bien une tasse de thé ?